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Recherche & Colombophilie
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  • Bonjour à tous, Je vous invite ici à lire quelques revues d'articles scientifiques dont les thèmes principaux seront le comportement du pigeon voyageur de manière général et en vol, l'apprentissage du pigeon et son orientation.
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Polymorphism within the LDHA gene in the homing and non-homing pigeons

Polymorphism within the LDHA gene in the homing and non-homing pigeons

Dybus, Andrzej and Pijanka, Jacek and Cheng, Yeong -Hsiang and Sheen, Fangmiin and Grzesiak, Wilhelm and Muszynska, Magdalena

    J´avais prévu de vous présenter cette publication mais une bien plus intéressante a été publiée cette année et m´a complètement absorbé. Je sais que celle-ci a déjà fait l´objet de revues, d´articles dans le monde colombophile, mais ma démarche n'est pas de regrouper et de discuter ce ces publications colombophiles. Je veux simplement vous donner les éléments nécessaires à la compréhension des articles scientifiques et vous laisse libre de l'interprétation qui en découle. Seulement, comme dans toutes publications, il se peut que des conclusions soient prises un peu trop vite sans prendre en considération tous les éléments et ce n´est pas toujours facile de mettre le doigt dessus.

    La présente revue est celle de l'article de Dybus et al., parue en 2006 dans le Journal of Applicated Genetic et qui se penche sur le Polymorphisme du gène LDHA chez le pigeon voyageur et non-voyageur. Il s´agit en fait d´une communication courte (short communication).

    L´article initial se trouve ici : https://link.springer.com/article/10.1007%2FBF03194601

Eléments de l'article

Tout d´abord, les gènes de la famille LDH (Lactate déshydrogénase) sont impliqués dans les métabolismes aérobies et anaérobies, ils sont donc impliqués dans l´endurance des muscles, la récupération et les capacités aérobiques. Chez les vertébrés on retrouve un isozyme LDH-A pour la réduction des pyruvates dans les tissus musculaires (anaérobiques) et un isozyme LDH-B pour l´oxydation des L-Lactate dans les tissus aérobiques. Une précédente étude de Dybus et al. a mis en évidence l´existence d´un polymorphisme pour le gène LDHA appelé HaeIII.

L´étude porte sur 445 pigeons, répartis comme ceci (voir tableau 1) :
              - 145 pigeons voyageurs de l´université de Pologne

              - 123 pigeons voyageurs provenant d´amateurs locaux

              - 98 pigeons voyageurs venant de Taiwan et Chine

              - 79 pigeons non-voyageurs de différents types (King, Strasser...)

Les différents groupes montrent des répartitions de fréquences alléliques différentes pour les allèles A et B du gène LDHA. Pour les groupes II et II, les fréquences des allèles A et B sont respectivement les mêmes, aux alentours de 0.20 pour l´allèle A (0.203 et 0.219) et 0.80 pour l´allèle B (0.797 et 0.781). La répartition des génotypes LDHAAB et LDHABB est globalement la même pour ces deux groupes et on retrouve le génotype LDHAAA a hauteur de 9.2% dans le groupe III et 3.3% dans le groupe II. L´allèle A est bien moins présent dans le groupe IV avec une fréquence de 0.006 contre 0.994 pour l'allèle B. Pour le groupe contrôle, la fréquence de l´allèle B est de 0.935, l´allèle a est à 0.065. De ce fait, les génotypes LDHAAA sont quasiment inexistants dans ces deux groupes (0.007 pour le groupe I et néant pour le groupe IV).

Les auteurs suggèrent donc que les différences moléculaires qu'ils ont identifié entre les allèles A et B du gène LDHA pourraient affecter l´activité de l´enzyme LDHA, influençant alors les capacités de vol dans les groupes II et III qu'ils ont appelé « top racing ». Comme on retrouve l´allèle A en plus grande quantité dans ces deux groupes « top racing », ils suggèrent (ils n´ont pas utilisé de termes catégoriques) que l´allèle A du gène LDHA a un effet favorable sur les performances des pigeons voyageurs.

Eléments de discussion

Il y a cependant plusieurs points à soulever concernant ce simple tableau.
Premièrement, ils comparent des pigeons voyageurs et des non-voyageurs mais les voyageurs sont surreprésentés dans l´étude (445 pigeons en tout, 79 non-voyageurs contre 366 voyageurs). C´est déjà, en soi, un énorme biais puisque les voyageurs sont représentés 4.5 fois plus que les non-voyageurs. Cette sous-représentation des non-voyageurs influencent directement les fréquences alléliques et on pourrait s´attendre à des changements dans ces fréquences si l´étude avait pris en compte un nombre plus grand de pigeons non-voyageurs.
De plus, dans les races de non-voyageurs, on ne retrouve pas de pigeons comme l´English carrier qui est une race plus proche des voyageurs.

Deuxièmement, ils comparent des voyageurs et des non-voyageurs. Pour être précis, ils comparent une population « pigeons voyageurs » à une autre population de « non-voyageurs ». En génétique, le terme population est défini pour une seule espèce et on peut donc parler de population du Strasser ou de la population du King. Ici, le regroupement de toutes ces espèces dans le groupe IV forme une communauté, ce n´est pas une population. Pareillement, chaque espèce de non-voyageurs se retrouve donc fortement sous-représenté par rapport à la population de voyageurs. Cela peut paraitre un peu tatillon de ma part de soulever ce point, mais comparer un groupe de populations à une population (repartis en trois groupes) n´a pas de sens. La base de la science étant de comparer ce qui est comparable et de pouvoir reproduire les expériences à l´identique. A titre d´exemple, la dernière publication portant sur le génome du pigeon, dont la traduction et la revue seront bientôt en ligne, compare différentes populations bien distinctes en séparant les diverses races de non-voyageurs.

Troisième point, ils ont labellisé les groupes II et III comme « top racing pigeons ». Sur quoi se sont-ils basés ? Ont-ils formé ces groupes sur la base des résultats individuels des pigeons aux concours ou ont-ils simplement choisi de les appeler comme cela parce que les pigeons proviennent d´un colombier pratiquant la sélection sur la base de résultats en concours ? Aucune mention n'est faite dans l´article et rien ne permet d'évaluer la qualité de ce groupe « top racing pigeons ». Sont-ils des pigeons de vitesse, de demi-fond, de grand fond ? Sont-ils des As pigeons, des gagnants de prix par 10 ou par 20 ? Au regard des éléments fournis, rien ne permet de juger ou de préjuger de la valeur de ces pigeons.

Quatrième point, le groupe de contrôle. Ce groupe est formé par les pigeons voyageurs de l´université de Pologne (groupe I). De même, rien ne permet de dire si ces pigeons sont sélectionnés sur la base de leurs performances en concours. D´ordinaire, les pigeons élevés par les universités servent le plus souvent à des études comportementales ou sur l´orientation et aucun élément présenté ici ne permet de juger de la présence d'une sélection ni sur quels traits celle-ci est basée.

Alors, que nous dit vraiment cette publication ?

Elle nous montre qu´il existe deux allèles, A et B pour le gène LDHA chez le pigeon. Ces allèles sont présents chez l´ensemble des pigeons mais les fréquences alléliques varient d´une population (ou communauté) à l´autre. On retrouve l´allèle A à hauteur de 20% chez le pigeon voyageur participant aux concours et la fréquence de cet allèle est très faible chez les races de pigeon non-voyageurs.

Pouvons-nous conclure que la présence de l´allèle A du gène LDHA permet un accroissement des performances ?

Et bien non, même si l´allèle A est plus fréquemment rencontré chez le pigeon voyageur, cette différence de fréquence pourrait être expliquer par plusieurs choses et pourrait notamment résulter d´un phénomène que l´on appelle la dérive génétique (faisant varier aléatoirement les fréquences alléliques au sein des populations). Une autre possibilité est l´auto-stop moléculaire. Pour faire simple, une région du génome peut comporter différents gènes qui se situent très proches les uns des autres : du fait de ce rapprochement, le gène, lorsqu´il est sélectionné, emmène avec lui les gènes qui lui sont proches. L´augmentation de la fréquence de l´allèle A du gène LDHA pourrait être due à la sélection d´un autre gène.

La fonction des gènes LDH est importante pour le fonctionnement des muscles : à 42% de la VO2 max, l'apport du lactate est deux fois plus important que celui du glucose et les gènes LDH peuvent donc probablement influencer la vitesse et l'endurance. Cependant, rien ne permet, au regard des éléments apportés dans cette publication, de conclure que l´allèle A du gène LDHA va permettre les pigeons de voler plus longtemps et plus rapidement (les deux groupes II et III de pigeons voyageurs montrent des niveaux similaires de fréquences alléliques, étant donné que les deux autres groupes ne sont pas représentatifs de la population « voyageurs », on ne peut pas établir un lien de cause à effet). Pour ce faire, il faudrait établir des critères permettant d'apprécier les performances des pigeons voyageurs (coefficient par exemple), de créer différentes catégories en fonction de ces critères ainsi que des distances pour lesquels ils ont performé, puis ensuite, étudier les fréquences alléliques au sein de ces différents groupes. Cela permettrait d´évaluer l'apport de l´allèle A dans les performances des pigeons voyageurs.

Je vous présenterai plus tard, une autre publication portant également sur le polymorphisme du gène LDHA chez le pigeon parue un peu plus récemment (2013) et qui apporte d'autres éléments de réflexion. Egalement, une revue très intéressante sur le génome du pigeon sera mise en ligne sous peu.

 

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